Consommation de la chair


Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Que meure comme il a vécu
Le poète qui comme moi
Toute sa vie a brûlé.

Que le corps se torde
Dans les flammes
En un dernier spasme.

Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Je ne veux pas être enfermé
Dans um cercueil
Mais emporté

Par la combustion !
Je veux que le feu
Me soulève en sursant !

Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Il a beaucoup aimé la terre,
Le poète, qu’ il ne soit
Pas son prisionnier.

Au millieu du brasier
Qu’ il s’ envole
Comme s’ il avait des ailes.

Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Qu’on lui brûle les pieds
Qu’on lui brûle les mains
Qu’on le brûle jusqu’au

Blanc des os
Et la douce substance
Qu’ il y a dans les os.

Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Que mes muscles forts
Se délivrent
De la rigueur de la mort

Sur des buissons en flammes !
Que mes bras soient comme
Des branches pétillantes !
Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.

Craque le bois
Où l’on a cloué
Des femmes en feu.

Que rien n’écrase
La chair de l’ homme
Qui tant aima la terre

(Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.)

Que la terre l’ épargne !
Et la cendre finale
S’ épandeet s’ évanouisse ...

Que le vent léger
L’ enlève invisible
Que le vent l’ emporte

(Ne m’ enterrez pas. Brûlez-moi.)

Vers la mer qui est libre
Vers la mer de l’enfance
Vers la mer immense...

(Da antologia “La poésie brésiliènne”, com organização e tradução de A. D. Tavares-Bastos, premiada em 1954 pela Academia Francesa. A 1a. edição francesa foi lançada por Editions Seghers, em Paris, em 1966.)

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